PATRIMOINE CULTUREL

Personnage célèbre

Jules Gimié
dit "le Chinois"

A quelques dizaine de mètres de "l'Abesque", le domaine de Pierre Richard, il est un lieu connu sous la dénomination de la grotte du chinois. Située en bordure de l'étant de l'Ayrolles qui, tout prés de là, change d'appellation pour devenir l'étang de Campignol, cette grotte peu profonde, plutôt un simple abri rupestre, voisine avec les ruines d'une ancienne "campagne". C'est là qu'au siècle dernier, et au début du nôtre, vivait avec sa famille celui qu'on appelait le Chinois, éponyme du lieu.

Le Chinois s'appelait en réalité Jules Gimié, né à Gruissan le 31 janvier 1838. Avec les troupes de Napoléon III, il participa en Extrême-Orient à la politique d'expension colonial du second Empire. D'où sans doute, le surnom dont l'affublèrent ses concitoyens. Enrôlé dans la Marine, il était l'ordonnance de l'Amiral La Motte (1).

Au cours d'une bataille ce dernier, bléssé, ne dut son salut qu'au courage de Jules Gimié qui alla le chercher pour le ramener en lieu sûr. Au cours de son intervention, le Chinois fut lui même blessé, une vicieuse balle ennemie allant se loger ... dans l'une de ses fesse ! Vous pouvez bien sourrire, n'empêche que son acte de bravoure lui valut de se voir octroyer la Médaille Militaire au nom de l'Empreure, par décret en date du 22 avril 1861. Le diplôme qui en atteste trône toujours en bonne place chez l'un de ses descendants.

Vivre en autarcie

Le 4 novembre 1858, à vingt ans tous juste, Jules Gimié épousait Anne-Louise Taillade. Le couple s'installait alors au lieu-dit "Les Goules", connu aujourd'hui sous le nom de la Combe du Chinois. Ensemble, ils auront 7 enfants : 3 garçons ( Alain, Louis et Marc ), et 4 filles ( Julie, Léonore, Marie et Louise ). Toute la famille vivra dans la campagne du Chinois.

Mais les dimensions restreintes de la maison (les murs extérieurs sont toujours debout) ne permettant à chacun d'y trouver sa juste place, on utilisa comme annexe la grotte voisine, ainsi que quelques autres abris rocheux des environs immédiats.


La maisonnette près de la grotte

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La Grotte du Chinois en 1956
et des descendants de Jules Gimié.

On pourrait penser aujourd'hui que la famille de Jules Gimié était plutôt marginale. En fait, elle ne vivait pas plus mal que la plupart des familles habitant dans les campagnes reculées. Et même peut-être mieux, car elle était organisée pour se suffire. Un puit, aujourd'hui dissimulé par les ronces, fournissait l'eau potable.

Toute la combe était cultivée : jardin potager, arbres fruitiers, et même de la vigne, dont on voit encore des plants retournés à l'état sauvage. Quelques chèvres et quelques moutons fournissaient le lait, donc les fromages, et le fusil de Jules lui permettait de s'approvisionnait en gibier. Enfants les filles étaient chargées de monter sur la barre rocheuse qui surplombe la combe pour guetter les vols de canards et avertir leur père de leur arrivée.

Mais le chinois, aidé ensuite par ses fils, pratiquait surtout la pêche dans l'étang voisin. La ressource principale en était déjà l'anguille. Un cheval et une carriole permettaient à sa femme d'aller vendre le produit de la pêche à Narbonne, ou de prendre le train à Tournebelle pour l'écouler sur Perpignan. Elle ramenait de la ville les produits de première nécéssité, et notament la farine, dont elle faisait elle-même le pain pour la famille.

Jules Gimié est mort en 1924, à l'âge de 86 ans. Son épouse ne le survivra que quelques semaines. Des enfants du Chinois, certains sont restés sur Gruissan : Alain (mort sur une mine à 88 ans !), Julie (qui fut concierge à l'école communal), et Léonore. Louis s'en est allé faire souche à Port-la-Nouvelle, et tous les autres se sont "expatriés" à Marseille. Parmi ses descendants (4ème génération minimum, mais on doit en être à la 7 ou 8 ou 9ème), on peut citer Louis Ambert (+ frère et soeur), Antoinette Cabrol, Jojo Martrou, facteur à Gruissan, et sans doute une bonne partie des Gimié, sinon la totalité, et notamment Pierre Gimié et son frère Joseph, Serge Gimié, pêcheur, mais aussi Guy Gimié, ancien Maire de Gruissan, ou encore Christian Gimié, pharmacien à Narbonne. Plus ceux que nous ne connaissons pas, ou que nous avons oubliés.

Quant à la grotte du Chinois, elle a, depuis, servi de refuge à quelques marginaux. Il y a quelques années encore, un pêcheur-peintre, vaguement "zen" y a habité, non sans l'avoir quelque peu dénaturée pour en améliorer le "confort" par quelques ouvrages de maçonnerie. Le pêcheur a quitté les lieux, mais les murs sont toujours là pour attester de son passage !

(1) : Les anecdotes concernant la vie de Jules Gimié, ainsi que la façon dont il vivait dans la combe du Chinois, nous ont été rapportées par deux de ses arrière-petits-enfants, Pierre Gimié et Louis Ambert, que nous tenons à remercier.


Cf : G.R.A.S.G.
F. G