Sommaire / Patrimoine architectural / le monument aux morts

PATRIMOINE ARCHITECTURAL

Architecture traditionnelle et vernaculaire

Le monument aux morts de Gruissan

Son histoire


La Guerre de 1914 - 1918

Trois jours seulement après l'armistice, le 14 novembre 1918, le Conseil Municipal prenait la délibération suivante :
(Maire : Joseph Camp).

"Le Conseil Municipal, après la conclusion de l'armistice qui a été signé le 11 novembre 1918 à 5 heures du matin par le Maréchal Foch, généralissime des Armées Alliées, avec les plénipotentiaires de l'Allemagne vaincue, à l'unanimité de ses membres présent, délibère :

- Considérant que notre première pensée de reconnaissance recueil lie après les victoires répétées et foudroyantes qu'ont remportées les Armées Alliées et qui ont forcé, l'un après l'autre, tous nos ennemis à capituler en souscrivant à toutes nos conditions, doit se reporter vers ceux qui ont donné leur vie pour le salut de la Nation et de l'Humanité, menacées par les hordes de modernes barbares.

- Une manifestation de toute la population, des fonctionnaires et corps constitués, après avoir défilé dans quelques rues du village, ira au cimetière porter une couronne offerte par les habitants de la commune, au pied du monument commémoratif qui a été élevé à nos morts.

- Le cortège sera ainsi constitué :

1 - En tête, un soldat portant le drapeau tricolore qui a vu tant de gloire, un de ces soldats qu'on a appelés "les poilus", humbles héros qui, pendant 52 mois d'une guerre sans merci, avec un ennemi redoutable, ont résisté aux pires souffrances et n'ont jamais perdu la foi dans les destinées de la France.

2 - Les enfants des écoles.

3 - Quatre poilus portant la couronne offerte par toute la population.

4 - Les porteurs et porteuses de couronnes diverses.

5 - Le tableau d'honneur de nos morts pour la patrie.

6 - Les orphelins de guerre.

7 - Les corps constitués et le Conseil Municipal.

8 - Les fonctionnaires et employés, les hommes et les femmes de la suite.

En ce jour mémorable dans l'histoire des nations, le Conseil Municipal croit qu'il est de son devoir de consigner, sur le présent registre destiné aux archives de la Mairie, pour le transmettre aux générations futures, l'hommage de son enthousiaste et respectueuse admiration pour ceux qui ont fait la France victorieuse dans cette lutte effroyable contre une horde de barbares qui semblaient conduits par un moderne Attila, ayant fait appel pour nous assassiner, nous empoisonner, nous incendier, aux ressources de ses hommes terribles, aujourd'hui répudiés par le monde civilisé.

En premier lieu, à tous ces vaillants poilus dont l'endurance aux misères de la tranchée boueuses et l'indomptable courage a fait perdre à notre ennemi l'espoir de voir le pacifisme envahir nos armées.


Le Conseil s'incline avec respect devant les noms vénérés du Maréchal Joffre et du Maréchal Foch, des Généraux Pétain, commandant le front de l'Occident, Geriraux, Mangin, Debeney ... Haïg commandant les armées anglaises et Pershing, les armées américaines."


Le 20 mars 1920 (Maire : Joseph CAMP).

Le Conseil Municipal désigne une commission de 4 membres : (Bonnot Louis, Valla, Garrigues et Devèze) pour être adjointe au Comité local qui s'est chargé de l'érection d'un monument commémoratif aux morts de la guerre.

Le 10 novembre 1920 (Maire : Joseph CAMP).

Le Conseil Municipal délibere ainsi :

" Le Comité . . . a communiqué le projet définitif et l'état des recette provenant de la souscription publique.

Il ressort que le coût croissant atteint 13 000 Francs environ et qu'il manque près de 3 000 francs que le Comité demande comme subvention.

Le Conseil Municipal ; ouï cet exposé, considérant que son devoir est tout tracé en cette circonstance par l'élan unanime qui a porté partout les populations à commémorer les héros de la Grande Guerre qui ont donné leur vie pour la Patrie et l'indépendance du monde ..." vote la somme de 3 000 francs (budget de 1920).

Considérant que le comité a exprimé le désir de commémorer le souvenir de nos morts avec la pierre extraite de nos carrières et dont la nature presque indestructible permettra d'élever un monument aussi durable que le souvenir qu'il doit perpétuer.

... Attendu qu'il convient de confier ce travail à des ouvriers carriers de la Commune, habitués à traiter la pierre en question, à l'unanimité des membres présents, décide de demander à l'administration supérieure que le Maire soit autorisé à passer avec M. Elie Valla, maître carrier, un traité de gré à gré suivant les plans dressés par lui et d'après lesquels le monument sera composé d'un piedestal de 3,72 m et d'un poilu de bronze de 1,60 m ... pour la somme de 3 000 francs.

La dépense totale s'élevant à 13 734 francs répartis comme suit :
- souscription : 10 456 francs.
- subvention : 3 278 francs.

Le 15 novembre 1921.

Le Conseil Municipal délibère qu'il y a lieu de procéder à l'inauguration avec le cérémonial qui convient et en l'entourant des manifestations patriotiques en usage dans cette circonstance.

Mr Paul Marty, notre doyen, se souvient d'y avoir participé à la tête des enfants des écoles et avec d'éminentes personnalités : (les frères Saraut, le Préfet, etc ...).

Le Conseil Municipal a voté une somme de 1 500 francs pour faire honneur à ses hôtes et payer les frais.

La guerre 1939 - 1945.

A l'issue de cette guerre, le Conseil Municipal a fait apposer une plaque portant les noms des 14 Gruissanais morts pour la France.

Avec les 64 noms de la Grande Guerre, ce monument honore 78 de nos morts.

 

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Le 19 mars 2003 a été inaugurée une plaque commémorative "En mémoire des combattants mort pour la France en Afrique du Nord 1952 - 1962".


Deux témoignages de reconnaissance sont également apposés sur le monument :

Ville de Gruissan
Le souvenir Français
à nous le souvenir
à eux l'immortalité

Aux veuves et orphelins
victimes des guerres
La patrie reconnaissante


Ce monument est situé Avenue du Général Azibert


Aujourd hui nous relatons le déroulement de la Fête Patriotique qui eut lieu pour son inauguration le 21 mai 1922 :


Les oriflammes et les drapeaux flottent joyeusement sous la brise marine.

Des arcs de triomphe se dressent fièrement dans les principales rues et sur les Boulevards pavoisés avec goût, une foule compacte se presse dans l'attente de M. le Ministre des colonies et de MM les Parlernentaires de l'Aude.

A 9 heures un long cortège se forme et se rend au cimetière sur les tombes des héros Gruissanais.

En tête derrière le drapeau, marchent les enfants des écoles, le Conseil Municipal, le Comité du Monument, les combattants et les mutilés, les familles des héros des défunts soldats.

L'harmonie du village interprète des marches funèbres.

Dans le carré aux morts, Mr Marcelin Iché, mutilé de guerre et Mr Baptiste Azibert secrétaire du Comité du Monument, saluent avec émotion la mémoire de leurs camarades soldats ou marins tombés pour la plus juste des causes.

Les enfants défilent en bon ordre devant les tombes, se découvrent et s'inclinent.

La foule compacte et endeuillée s'écoule, pieusement recueillie et émue.

A dix heures l'Harmonie sous l'habile direction du Maestro François Carbonnel, donne un brillant concert sur la place publique.

A midi, la population, groupée à l'entrée du village salue l'arrivée des personnalités : Mr Albert Sarraut, son frère Maurice sénateur, le député, le préfet de l'Aude, le sous préfet de Narbonne, le conseiller général, le conseiller d'arrondissement, les maires des villages voisins.

 

Un jeune élève récite un compliment, une gentille demoiselle offre au ministre une superbe gerbe de fleurs.


La musique joue La Marseillaise, puis le cortège, précédé de gendarmes à cheval et salué respectueusement par la foule, gagne les écoles où doit avoir lieu un banquet intime.

Au dessert ce sont les discours d'usage.

Mr Herbeil, maire, remercie les autorités qui à leur tour félicitent la Municipalité pour son accueil.

Mr le Ministre salue la vaillante population de Gruissan, symbole de labeur et de dévouement.

Il remet à Mr Herbeil les Palmes Académiques.

Le cortège se reforme et se rend au monument.

La Marseillaise est écoutée tête nue par la foule.

Le voile qui recouvrait le monument est alors enlevé.

Mr Brieu chante l'Hymne aux Mort de Victor Hugo.

Mr Gimié, président du Comité remercie la Municipalité et les souscripteurs et remet à Mr le Maire le Monument, éternel symbole de reconnaissance et de gratitude pour les artisans de la victoire et termine par : Gloire à vous, morts héroïques, nous jurons de garder votre souvenir et de perpétuer votre mémoire.

Mr le Maire, à son tour, Glorifie les héros, "ces frères de terre et de mer qui ont fait à la Patrie l'ultime sacrifice, puisse cette communion des vivants et des morts nous faire abandonner les égo¨sme et les haines".

Enfin voici le discour du Ministre :

"Il est juste et nécessaire, que de telles manifestations se succèdent sur le territoire.

Les morts ne sont pas morts ; il ne sont morts que lorsqu'on les enveloppe dans les ténèbres de l'oubli.

Si nous sommes libres, c'est parce qu'ils ont payé de leur vie la rançon de notre liberté.

Les jours passent, le monde reprend peu à peu le rythme normal de son activité et l'on aurait tendance à oublier les souffrances des modestes poilus dans leur calvaire.

Ils avaient de qui tenir, ceux qui ont trouvé leur linceul dans les flots bleus ou sur les terres glacées du Nord.

O morts glorieux qui nous avez donné la victoire, voici que le monde entier, commotionné retrouve difficilement son équilibre.

Enfants de Gruissan qui nous avez dit, nous mourrons pour que la France soit belle et qu'elle continue son apostolat de liberté et de justice sociale, nous voulons que disparaisse à jamais le cauchemar de la guerre, nous ferrons l'impossible pour garder la forte et loyale paix".

La cérémonie terminée, la foule accompagne jusqu'à la sortie du village Mr le Ministre et sa suite.

Gruissan a commémoré ses glorieux héros et gardera le fidèle souvenir de cette touchante cérémonie patriotique.

La population reçut par la suite les remerciements des autorités pour son accueil, si cordial, si chaleureux.


Cf : Gruissan d'Autrefois n° 58 - Sources : P. SALENCON, n° 178 - Sources : Articles de presse de 1922 - Archives Paul Carbonel.
G.R.A.S.G.
J. G et F. G