Sommaire / Patrimoine naturel /Flore / Terrestre /Les plantes de bord de mer

PATRIMOINE NATUREL

FLORE


Terrestre


Les plantes de bord de mer


Les récoltes de plantes du bord de mer.

Le 4 janvier 1789, le conseil paroissial de la commune est réuni sous la présidence du Maire Consul M. Camp.

L'ordre du jour est de délibérer, sur les "déclarations du roi des 30 mai 1731 et 30 octobre 1772, concernant la cueillette des herbes de mer connues sous les noms de varech, vraiq, sar ou gouesmon."

Ces lois ordonnent aux habitants des paroisses des côtes maritimes de s'assembler le premier dimanche du mois de janvier de chaque année, "à l'issue de la messe paroissiale", pour déterminer le nombre de jours nécessaires pour "cueillir, couper et ramasser les dites herbes pour engraisser leurs terres ".

L'assemblée délibère à l'unanimité "que les habitants de cette communauté n'entendent point profiter, cette année seulement des avantages accordés relativement à la coupe des dites herbes pour servir à l'engrais de leurs terres, mais tous les habitants pourront les cueillir, couper et arracher dans toute l'étendue de la côte du présent lieu, depuis le 1 juillet prochain jusqu'au 1 octobre suivant, pour en fabriquer de la soude. "

La copie de cette décision sera déposée au greffe de l'amirauté de Narbonne et la réponse publiée et affichée le dimanche suivant 11 du mois courant, devant la porte d'entrée de l'église.

Lorsque le Conseil se réunit le 11 janvier 1789, il n'est plus question de la cueillette des herbes, il faut essayer de venir en aide aux agriculteurs, victimes d'inondations.

Dans la nuit du 7 au 8, "la mer n'avait pas été tant agitée depuis très longtemps, puisque ses eaux s'étaient si élevées qu'elles ont inondé toutes les pièces de terre qui sont près de la mer et toutes celles qui bordent les étangs salés dans le terroir du présent lieu.

La plus grande partie de ces terres était semée en blé, dont le produit qu 'elle aurait fait, ainsi que la semence et la culture sont pour chacun des propriétaires d'icelles une perte fort considérable.

Non seulement, en perdant la récolte qu 'ils espéraient, les propriétaires seront encore privés pendant longtemps d'en recueillir sur ces terres: l'eau de mer en ayant rendu insalubre une grande partie et emporté à l'autre le peu de bonne terre qu 'elle avait reçue par les soins des tenanciers. "

De plus, si les propriétaires ne veulent pas abandonner ces terres mais au contraire désirent continuer à les exploiter ils devront réparer " tous les fossés qui les entouraient car ils sont comblés et reconstruire les élévations qu 'on avait faites pour empêcher l'eau d'entrer. "

" Il en résulte que ceux qui jouissaient de ces biens sont dans la plus grande détresse, attendu que leurs soins, leurs travaux et leurs avances sont pour eux devenus inutiles et qu'ils ne peuvent fournir aux frais des réparations.

Sans le secours d'une indemnité, ils seront dans l'impossibilité de payer les impositions, de subvenir aux besoins de leurs familles et de pouvoir nourrir leurs bestiaux nécessaires à la culture des terres. "

Après délibération et approbation à l'unanimité, la copie sera envoyée à M. le Syndic du diocèse " que l'assemblée supplie de daigner jeter un regard favorable sur la situation triste des habitants et d'envoyer des commissaires pour procéder à la vérification des dommages subis et d'accorder à ceux qui en souffrent une indemnité proportionnée à leurs pertes. "

Toutes les plantes citées dans le premier texte, ne se trouvent pas à Gruissan, 1'herbe qui intéresse les habitants de la communauté est le salicor qui leur permet non pas d'engraisser les terres, mais d'obtenir la soude nécessaire à la fabrication du savon et du verre.

(Voir dans les numéros 219 et 221 de Gd.A, l'intéressant article de Jean-Claude Courdil).

Au XVIireme siècle, les Gruissanais vivaient autant des ressources de la mer que de celles de la terre.

Ils cultivaient la vigne sur des surfaces gagnées par défrichement des collines.

Le vin n'a jamais apporté un revenu important à la communauté : trop corsé et spiritueux, il n'était pas estimé par les négociants de Narbonne.

La qualité défectueuse, les conditions de transport fort onéreuses ont fait que la plus grande partie des vins de Gruissan étaient transformée en trois-six.

Au village il existait trois brûleries.

" Celles-ci ne fabriquaient qu 'à grand frais, en raison de la rareté du combustible, car même avec les appareils préconisés en 1780 par Chaptal il fallait rectifier quatre ou cinq fois pour obtenir le trois-six, c 'est à dire l'esprit de vin le plus fort en usage dans le commerce.

Ce liquide était embarqué sur les tartanes de Gruissan au grau du Grazel, à destination d'Agde, Cette et Marseille. " (J. Yché)

La culture du blé était plus importante.

Tout les terrains autour des étangs, tous les bas-fonds constitués peu à peu au pied de la montagne par l'épandage des alluvions, l'assèchement des sables vaseux et des débris coquilliers étaient ensemencés.

Sur les pentes rapides des collines, les agriculteurs tentaient de retenir la terre à l'aide de murets de pierres extraites du sol défriché.

Sur ces minuscules champs les épis jaunissaient, les pampres verdoyaient et quelques oliviers poussaient.

Les coups de mer dans les bas-fonds et les forts orages détruisaient souvent les récoltes.

La lecture de la délibération du 11 janvier 1789 nous montre le désarroi des habitants de la communauté gruissanaise.

Leurs récoltes anéanties par une montée des eaux, ils sollicitent du pouvoir 1' obtention d' une aide pour compenser les dommages subis.

N'est-ce pas ce qu'il se passe encore de nos jours, après une inondation, une tempête ou autre, lorsque l'état déclare le site victime d'une catastrophe naturelle afin de compenser au maximum les pertes ?

Pensons qu'en 1789 les assurances ri*existaient pas.

Cf : Sources: Archives Départementales de 1' Aude.
Etude historique sur Gruissan par Julien Yché Jenny Blanch
F. G - GRASG