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PATRIMOINE ETHNOGRAPHIQUE

Pratiques artisanals

Vendémiaire
Les petits propriétaires

C'est ainsi qu'on désignait, dans l'entre-deux guerres, les viticulteurs-vignerons qui assuraient, par leur travail et leur savoir-faire, la culture de la vigne et l'élaboration de leur vin.

Viticulteurs, ils étaient de père en fils, car la propriété sur laquelle vivait toute la famille faisait partie de leur patrimoine, transmis de génération en génération. Au cours des saisons, le petit propriétaire exécutait les divers travaux, avec l'aide de son cheval ou mulet pour les labours et transports, de son fils pour les travaux de "brasse" : taille, binages, tuteurages et autre soins réclamés par les ceps. La vendange était une affaire de famille ; bien sûr, elle se faisait à la main et le cheval était un précieux auxiliaire pour le transport.

Oenologues, ils étaient aussi car cette vendange, logée dans leur cave particulière, fermentait dans les vieux foudres. Plus tard, dans les années "trente" la mode des cuves en béton armé se répendit. Le travail de cave obéïssait à des méthodes ancestrales et routinières et seule la force musculaire actionnait les divers outils : grue pour monter chaque comporte sur le plancher des cuves, pompe pour transvaser le vin nouveau d'une cuve à l'autre, pressoir banal (ou mobile) qui venait, le jour dit, stationner devant le portail. Le vigneron procédait à plusieurs soutirages pour assurer la bonne conservation du vin, jusqu'au moment de la vente.

Aussi, la visite du courtier en vins, venu prélever un échantillon de chaque cuve était-elle attendue avec impatience. Le verdict du négociant tombait 2 ou 3 jours après et le petit propriétaire pouvait récupérer ainsi le fruit de son travail annuel.

Aujourd'hui, que de chemin parcouru !!! Dans les vignes, le travail est fait par des "engins" qui allègent le travail des hommes. Les tracteurs, tirant les rotavators, labourent à 5 km/h alors qu'avec le cheval tirant l'araire, il fallait 10 fois plus de temps. Les traitements phytosanitaires, indispensables si on veut récolter, se faisaient autrefois à la main, avec le bidon Vermorel alors qu'aujourd'hui de véritables petites usines soufflantes, tirées par les tracteurs, exécutent ce travail dans un rien de temps. Seule, la vendange posait problème car il faut beaucoup de personnel pour la cueillette manuelle. Ce problème est résolu par la "floraison" de machines à vendanger qui enlèvent rapidement la récolte, même de nuit !

Enfin, le petit propriétaire est débarrassé du souci de la vinification depuis la création, en 1947, de la cave coopérative. Ainsi, dès la dernière benne, le vigneron se sent en vacances !

Mais ! car il y a un mais ! Autrefois, avec une récolte de 2 à 300 hl, le petit propriétaire faisait vivre toute sa famille. Il était, certe, "esclave de son travail", des soins journaliers à donner au cheval, responsable de la qualité de son vin. En retour, c'était un "homme libre".

Aujourd'hui, malgré l'enorme apport du progrès dans l'exercice de sa profession, le petit propriétaire ne peut pas vivre sur 200 hl. Il en faudrait 4 fois plus ! Et puis, il faut toujours moderniser l'outil de travail, mettre en adéquation le produit fini et les exigences de la clientèle, se remettre sans cesse en question.

Plus libéré peut-être dans sa participation personnelle, plus soulagé dans son activité, le vigneron d'aujourd'hui n'en est pas moins angoissé par l'avenir d'une profession qui traverse des crises, parfois douloureuses !

Mais où sont les petits propriétaires d'antan?

Cf : Gruissan d'Autrefois n°164
F.G.